ICI, LÀ ET AILLEURS

Il était un fois un joyau perdu au milieu de
la lagune, au milieu de nulle part, une ile sauvage et déserte loin des dorés de la sérénissme.

La lagune est un miroir ou une foultitude d'îles et d'îlots se dorent la pillule, certains habités, d'autres déserts à jamais, certains minuscules comme un mouchoir d'enfant, d'autres généreux comme celui d'un  vieillard !

Là les morts y ont élus domicile, là les vivants se sont tirés !

Torcello est l'une du trio gagnant si l'on peut dire avec Murano et Burano, autant les deux autres sont gaies, joyeuses et peuplées avec leurs maisons basses au ras de l'eau, autant celle-là est déserte, sans âme qui vive et empreinte d'une infinie mélancolie.

Le quai avec le restau et au loin la cathédrale. 

Quand j'ai accosté sur le débarcadère moussu et moulu j'ai eu comme un flash back, une réminescence d'un lieu oublié et enfoui vainement cherché. J'avais enfin devant moi le paysage du "Rivage des Syrthes" ! Ici, l'eau n'a pas la coloration d'ailleurs, gorgée de terres venues d'on ne sait d'où, de pieux et de pontons rongés par l'oubli elle a une épaisseur sans nom, millénaire et ascétique.

N'oublions pas qu'elle fut l’île la plus importante en habitants de la lagune il y a fort longtemps. Malheureusement, une épidémie de malaria chassa les survivants dans les îles environnantes laissant Torcello dans sa torpeur et son mystère.

Vue d'ensemble. 

Témoignage de cette époque prestigieuse, l’île possède une cathédrale époustouflante, Santa Maria Assunta, bijou de brique dans le style veneto-byzantin cher à l’époque. Elle cache en ses entrailles un trésor merveilleux et unique fait de mosaïques byzantines et de peintures Renaissance.

Elle fut construite au 7e siècle et c’est l’église la plus ancienne du coin. Bien sûr elle subi des transformations au 9e, et au 11e on lui ajouta un campanile. Comme beaucoup de ses consœurs elle est dépositaire des reliques de saint Héliodore enfermées dans un sarcophage romain.

Dieu et ses potes, de l'or toujours de l'or!

Un autel baroque et un détail du Jugement.

 Quand on pénètre à l’intérieur, composé de 3 nefs, on est ébloui par tout cet or qui ruisselle des murs et vous tombe dessus. Un voile de milles reflets irréels. Un sublime mélange de mosaïques, de peintures, de sculptures, de colonnes, de voûtes et d’arcs. 

Au revers de la façade, l'ultime et unique Jugement dernier réalisé en mosaïque par des artistes de Ravenne et réparti sur 6 registres se lit de haut en bas, et divisé en deux, il date des 12e et 13e siècles.

Impossible à l'intérieur de prendre des photos même sans flash, et c'est à la dérobée que j'ai pu en saisir quelques unes pour la postérité ! Le fameux Jugement dernier impressionnant et merveilleux travail de mosaïques.

Ce n’est qu’une succession de scènes magiques relatant la Crucifixion, La descente aux Enfers, Adam et Eve, les archanges, un fleuve de feu menant à l’enfer, et bien d'autres. Puis le Triomphe de la mort, la Séparation des élus et des damnés. La Punition. J’ai beaucoup aimé les gourmands se mangeant leurs mains. Enfin le Paradis ou trône saint Pierre et ses fameuses clés, c'est pas là que je finirais mes jours dans une autre vie !.
Dans l’abside, c’est plutôt à la gloire de la Vierge avec l’Annonciation et La vierge à l’enfant. Plus loin, une fenêtre ouvrant à l’est symbolise le Christ.
Au sol, de magnifique pavements, des dessins uniques entremêlants faunes et flores aux délicates courbes.
Derrière la basilique, s’élance le campanile offrant une vue exceptionnelle sur la lagune environnante.
L’église Santa Fosca juste à côté mérite une visite.

Tout autour ce ne sont que statues à l'abandon, amas de pierres, de plus l'intérieur est en très mauvais état, quelle tristesse de voir ainsi un chef-d'œuvre du passé parti en décrépitude !

On devine le long du chemin qui longe le canal des barques vermoulues, endormies, une végétation rabougrie brulée par le sel. Plus loin, d'autres rii s'enfoncent dans la terre sans couleur, des blocs d'argile dans un chaos nullement orchestré, mais aussi des quais effrondrés et quelques vestiges d'habitations dans le vide et l'irréalité du lieu.

Pas un chat si l'on peut dire sauf un restaurant de luxe, mais quelle idée de venir ici faire un repas gastronomique, une atmosphère à vous couper l'appêtit ! 
On rentre à Venise le soir au crépuscule livide. Je suis Vanessa accompagnée d'Aldo plus tard dans la nuit lagunaire vers Venise aux reflets d'or. Dans mon cœur, le souvenir unique et lumineux d’un mélange intemporel d’art et de spiritualité. Enfin "Le rivage des Syrthes" est devenu réalité !